Histoire(s) de foot : la Wunderteam et Matthias Sindelar contre le nazisme
On profite de cette trêve inattendue pour continuer de parcourir l’histoire mondiale et locale du football… On vous raconte aujourd’hui l’histoire de Matthias Sindelar, le Mozart du football, qui a combattu le nazisme au péril de sa vie.
Mai 1931. L’Autriche est la première équipe hors Royaume-Uni à battre l’Écosse sur le score sans appel de 5 à 0. La Wunderteam est née. Cette magnifique équipe très technique sera déclarée championne d’Europe en 1932 et ne sera battue que deux fois entre ce match et la Coupe du monde 1934 :
- par l’invincible Angleterre : 4-3 en décembre 1932 (c’était la première fois que les anglais encaissaient plus d’un but à domicile,
- et en avril 1933 contre la Tchécoslovaquie (actuelles République Tchèque et Slovaquie) : 2-1.
La Wunderteam, le 7 décembre 1932.
Au milieu de cette équipe brille celui que l’on appelle le “Mozart du football” : Matthias Sindelar. Né en 1903, il est d’un physique très frêle (60 kg) et reprend la technique de Friedenreich pour briller. Ce magnifique dribbleur considéré comme le meilleur joueur du monde à l’époque fait les beaux jours de l’Austria Vienne et inscrira 600 buts en 700 matchs pour le club.
L’Autriche s’avance donc à la Coupe du monde 1934 en favori. Elle s’inclinera en demi-finale contre l’Italie dans un match particulièrement houleux puisque Luis Monti, joueur Argentin réputé comme le défenseur le plus brutal et méchant de l’histoire, jouant pour l’Italie, blessera volontairement Sindelar.
Le carton rouge et les remplacements n’existant pas à l’époque, l’Autriche s’inclinera 1-0 à 9 contre 11 avec quelques actions digne d’un film comique (le but sera marqué par 3 joueurs italiens plaquant le gardien au sol, et l’arbitre suédois du match dégageant volontairement de la tête une passe en profondeur pour un attaquant autrichien seul devant le but).
Sindelar ne rêve alors que de revanche à la Coupe du monde 1938. Malheureusement, après avoir été vaincue par l’Italie Mussolinienne sur le terrain, l’Autriche est envahie par l’Allemagne nazie en 1938 dans l’indifférence, notamment, de la France.
Hitler décide alors pour rassembler le pays d’organiser un match amical entre l’Autriche et l’Allemagne. Ce match connu sous le nom d’Anschlusspiel avait été arrangé par les nazis et devait se terminer à 0-0 pour témoigner de la fraternité des deux peuples.
Matthias Sindelar ne le voit pas de cet œil-là et ridiculise l’Allemagne en réalisant un festival et en ratant volontairement les buts après avoir éliminé l’ensemble des joueurs allemands pour montrer que le match est truqué. A la 70e minute, encouragé par la foule il décide finalement de marquer et s’en va fêter son but devant la tribune des dignitaires Nazis. L’Autriche s’impose 2-0 et fait la fierté de son peuple qui refuse la mainmise nazie. Le match sera présenté le lendemain dans la presse comme une victoire Allemande.
Matthias Sindelar (à terre après sa frappe) en 1932 face à l’Angleterre.
Sindelar va plus loin en refusant d’intégrer l’équipe nazie pour la Coupe du monde en prétextant une blessure datant de 15 ans. L’Allemagne sera éliminée dès le premier tour par la Suisse, la Suède gagnant ce premier tour par forfait de l’Autriche.
L’Allemagne nazie ne confirmera pas la supériorité de sa race sur le terrain, mais Sindelar est alors traqué par le régime. Il est retrouvé mort asphyxié en 1939 après 8 mois de cavale, avec sa compagne juive italienne, dans des circonstances floues (accident, suicide ou meurtre… ?).
Plus de 15 000 personnes accompagnent sa dépouille au cimetière et, depuis, chaque 23 janvier, les footballeurs autrichiens se rendent sur sa tombe.
Pour occuper vos journées et soirées à la maison…
- un peu plus de lecture, dans Les cahiers du football
- un podcast de l’Œil du tigre à écouter
- et encore plus de lecture, avec “Les champions d’Hitler”, de Benoît Heimermann (Stock), pour comprendre l’utilisation du sport par les régimes totalitaires.
Très bon article que j’ai relayé sur mon blog. Bonne continuation.